Je viens d’apprendre la fermeture d’O’Reilly France, filiale française de l’un des gourous d’Internet, Tim O’Reilly, l’un des premiers, dès 2004, à avoir lancé la notion de « web 2.0 » qui définit le web comme une plateforme informatique à part entière. Au-delà de l’aspect nostalgique pour l’un des éditeurs parmi les plus réputés dans le domaine informatique, on peut se poser la question quant à l’avenir du livre informatique dans les années à venir, et pourquoi pas plus généralement du livre d’information.
L’un des principaux défauts du livre informatique est qu’il n’est pas à jour, car il se déprécie vite. Dans un domaine où l’information circule à la vitesse de la lumière ou presque, et que les Internautes ont pris l’habitude d’y accéder gratuitement, les processus de rédaction, de vérification, de mise en page, d’impression, de distribution et de livraison liés au livre paraissent peu adaptés aujourd’hui. En effet, s’il y a dix ans, les informaticiens avaient pour habitude d’aller dans une librairie spécialisée pour acquérir de nouveaux savoirs, désormais, ils utilisent un moteur de recherche pour trier les diverses sources d’information, discutent dans les forums ou les blogs pour échanger les connaissances, et participent à groupes de discussion et d’entre-aide, le tout, généralement, gratuitement.
Le modèle économique du livre papier payant est-il pour autant révolu ? Du livre papier, je pense certainement que oui, car même si le support papier reste l’un des plus pratiques pour une lecture intensive, contrairement à un écran qui est plus adapté à une lecture superficielle et en diagonale, privilégiant l’interactivité à la concentration, dans le cadre de livres informatiques en particulier, le support papier a de nombreux inconvénients qui le rendent peu adapté. D’ailleurs, le livre électronique se vend de mieux en mieux, même si cette voie reste encore très marginale.
En revanche, dans le domaine de l’information sur le web, j’ai du mal à croire que les Internautes soient prêts à payer pour obtenir une information. Car on a beau reprocher à la Wikipédia d’avoir des défauts, dont celui de permettre à chacun d’y poster des informations non vérifiées, voire fausses, cela reste une source d’informations des plus utilisées, au même titre que peut l’être Google pour faire des investigations.
Aussi, à terme, les éditeurs de livres informatiques ont sans doute tout intérêt à rechercher d’autres voies de monétisation, notamment en proposant tout ou partie de leurs contenus en accès gratuit, et de proposer des services tiers à valeur ajoutée.
Ainsi, si le livre explique comment pêcher, l’éditeur peut en parallèle vendre du poisson pour les plus pressés. Par exemple, un livre en ligne peut devenir un excellent moyen promotionnel pour les services de prestation de leurs auteurs, que ce soit pour participer à des conférences, ou encore résoudre des problèmes spécifiques, à moins de confier la résolution de ces problèmes à d’autres professionnels de l’informatique qui exploitent les idées du livre pour résoudre les problèmes des Internautes contre rémunération, payant une commission à l’éditeur, qui lui même pourra rémunérer l’auteur.
Notez qu’un tel modèle économique, assez peu commun dans le monde de l’édition, est tout à fait présent sur le web par ailleurs. Moi-même, j’édite un site web sur les tampons encreurs qui explique ce qu’est un tampon société, ou détaille l’usage du tampon dateur. Le site en lui-même ne vend aucun tampon — c’est le métier des imprimeurs –, mais informe des divers outils disponibles sur le marché, ou encore leur usage habituel. Il n’est cependant pas impossible que j’y ajoute de nouveaux services à valeur ajoutée, voire que je passe à la vente directe ou via affiliation de certains types de tampons les plus populaires. Si le site a un intérêt, celui de fournir notamment les informations attendues sur chaque type de tampon (information qu’aucun imprimeur de France ne semble fournir, aussi étonnant que cela puisse paraître !), personne n’imaginerait aujourd’hui d’acheter un livre sur le sujet !
Par ailleurs, je note souvent que sur les sites web des auteurs informatiques, on trouve, en plus des références de leurs livres avec des liens d’affiliation (dont les commissions en cas de vente sont probablement parfois supérieurs aux droits d’auteurs ?), on trouve de plus en plus de publicités contextuelles permettant aux visiteurs les plus pressés de faire appel à des services tiers payants, une fois qu’ils se sont rendus compte que par manque de temps ou de compétences, la lecture du seul livre ne suffira pas à combler leurs attentes.
Dans le courant de l’année, j’envisage de mettre en ligne plusieurs livres tombés dans le domaine public pour étudier de plus près l’intérêt des gens pour ce type de publications. Il faudra néanmoins réfléchir à tous les aspects que la mise en ligne permettra de faire et que le livre papier ne permettait pas tout en éliminant les gadgets inutiles et en se concentrant sur les aspects les plus pratiques et les plus pertinents.
Et pour vous, l’avenir du livre est-il compromis ? La perte d’intérêt des lecteurs pour la presse papier payante concerne-t-il aussi les lecteurs de livres ? Cette perte d’intérêt concerne-t-elle uniquement les livres informatiques, ou les livres d’information, ou bien touche-t-elle, selon vous, tous les types d’ouvrages ?
J’ai un exemple! Un livre qui s’appelle « Pratique d’ActionScript 3 » (ActionScript est la langage de programmation de Flash), qui a ete ecrit par une seule personne Thibault Imbert qui ne l’aurait jamais ecrit s’il n’avait pas ete persuade de se faire editer. 1200 pages en francais, deja une reference pour la communaute Flash francaise (qui ne comprend pas l’anglais?), livre tres attendu, et des sa sortie une reference… mais voila a la derniere minute le livre n’a pas pu etre edite, alors l’auteur a decide le le mettre a telecharger gratuitement en pdf:
http://pratiqueactionscript3.bytearray.org
Il y a 10 ans je suis sur que le livre aurait ete edite, car il aurait ete une bonne source de revenu pour l’editeur. Ainsi la prochaine fois, cet auteur y reflechira a deux fois avant de se lancer dans une telle entreprise, ca ne veut pas dire qu’il n’ecrira plus, mais certainement pas a un tel standart prevu pour l’edition d’un livre papier.
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