C’est la question que je me posais depuis quelques mois déjà : fournir un titre racolleur dans les flux RSS permet-il d’améliorer son audience ? C’est en tous les cas la stratégie adoptée par le quotidien Le Monde qui n’hésite pas à titrer un article dans ses flux RSS :
L’écurie de Formule 1 Honda rachetée par le Mexicain Slim
alors que le titre du site est plus posé :
L’écurie de Formule 1 Honda convoitée par le Mexicain Slim
et que l’article explique justement qu’aucune cession ou acquisition ne sont prévus :
Le milliardaire mexicain Carlos Slim pourrait racheter l’écurie Honda de Formule 1, laquelle avait annoncé son retrait de la compétition en raison de la crise économique mondiale, a indiqué samedi 27 décembre le site internet du quotidien italien La Stampa. Une information aussitôt démentie par un représentant de Carlos Sim, dimanche à Mexico. « Il n’y a pas d’achat de l’écurie Honda, il n’existe aucun accord ni aucune négociation », a déclaré à l’AFP ce représentant du groupe industriel et financier, sous couvert de l’anonymat.
Et ne croyez pas que ce cas soit isolé ! Cela fait déjà plusieurs mois que je vois les titres issus de la presse nationale, en particulier la presse généraliste, utiliser ce genre d’astuces pour améliorer son audience.
Souvenez-vous de l’affaire de la moustache raccourcie par les media américains au moment de la seconde guerre du Golfe pour faire ressembler Saddam Hussein à Hitler et le rendre, en période de guerre imminente, plus détestable. Plus récemment, et moins grave, Paris-Match effaçait des formes disgracieuses à Nicolas Sarkozy. Mais l’on avait jusqu’ici une meilleure idée de la presse d’information généraliste française. Manifestement, à tort.
Faut-il pour autant s’étonner que l’ensemble de la presse nous manipule ? En effet, je l’avoue, j’ai davantage tendance à cliquer sur les titres (qui apparaissent dans l’interface de mon webmail, Gmail, non accompagnés d’extraits) lorsque ceux-ci sont percutants plutôt que sur des titres qui le sont moins. Comme quoi, il semble bien y avoir une incidence entre le titre racoleur et le trafic.
Peut-être que le journal espère que les lecteurs pesteront contre l’outil qui relaie l’information — fausse — et non contre le quotidien ? Après tout, le « bon » titre apparaît sur le site du journal et le « mauvais » partout ailleurs. Pour ma part, je me sens pour le moins manipulé, et par conséquent je retire cette source de fausses informations des flux RSS suivis.
Ce n’est pas le racolage en soi qui doit être mis à l’index, mais la tromperie. Le titre d’un article doit être informatif, mais pas seulement. Il doit aussi solliciter l’intérêt du lecteur potentiel et l’attirer sur un territoire marchand (achat du canard papier ou visite du site plein de pubs). Pour la création de ces titres accrocheurs, les rédactions ont même des spécialistes. Déjà à ce niveau-là, la responsabilité du titre, comme celle de la légende des illustrations échappe parfois à l’auteur de l’article pour revenir, par exemple, au secrétaire de la rédaction.
Les nouveaux usages de consultation de l’information pourraient rendre admissible le décalage entre le titre du flux et le titre de l’article, vu que la cible est un peu différente. Sauf qu’avec cet écran de plus entre la source de l’info et le consommateur, la logique marchande l’emporte souvent au détriment de la vérité.
La responsabilité de la tricherie et du mensonge y serait donc diluée, me direz-vous, en raison de la taille des groupes de presse et du morcellement des tâches.
Et bien, il n’y a pas qu’eux :! Nous sommes tous coupables, tous responsables : le syndrome du mammouth vénal a contaminé la plus minuscule souris du web, puisque n’importe qui peut s’ouvrir tout seul sa petite page web avec sa petite régie publicitaire. Et chacun s’essaye à drainer sur son site, par n’importe quel moyen, inavouable parfois, les clics miraculeux qui feront entrer trois petits sous de plus dans son escarcelle.
Comme moi, là, vous avez vu, j’ai précisé l’adresse de mon site …
Certes, chacun d’entre nous essaye de drainer un trafic plus ou moins important, plus ou moins ciblé. Chacun y publie sous sa responsabilité. Ceci dit, tromper le lecteur, quand on est un journal qui emploie des journalistes dans le but de provoquer plus d’intérêt et de visites, ne me semble pas bon.
C’est toute la différence qu’il y a entre un journaliste qui écrit des informations vérifiées et par conséquent considérées comme vraies et un blogueur lambda. On dirait que l’information est nivelée par le bas et que plus rien ne distingue la vérité d’une contre-vérité. Et lorsqu’un journal confond recherche de la vérité et recherche de profit, il y a un véritable danger.
Sur le fond de votre article, je suis bien d’accord : la responsabilité de l’éditeur professionnel est bien différente de celle de l’amateur blogueur. Comme la responsabilité juridique du garagiste revendeur par rapport à celle du particulier qui revend sa voiture.
Mais la chute de mon commentaire était un peu plus qu’une pirouette : dans le domaine de l’information, le lamda dispose d’outils de pro pour la communication et il en use et en abuse. En contrepartie, sa responsabilité tant pénale que civile peut être recherchée sur les mêmes bases juridiques que pour le journaliste et son employeur. Le frontière s’amincit entre l’organe de presse traditionnel et le blogueur aux 100.000 lecteurs quotidiens. (Heu… c’est pas moi celui-là, enlevez trois zéros)
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