Cela faisait un an que je suivais l’actualité de l’impression 3D. Plusieurs de mes amis ont goûté à la mode du maker. L’un d’entre eux crée des machines sur mesure produites en petite série. Un autre exploite sa fibre artistique pour donner vie à des sculptures jusque-là uniquement virtuelles. Pour moi, c’est la découverte par la pratique, en début d’année, des objets connectés, qui m’a fortement poussée à m’intéresser à l’impression. Programmeur par passion dès le plus jeune âge, j’ai toujours été contraint par le matériel existant. La découverte de l’Arduino (et du Teensy), puis du Raspberry Pi, ont fait naître divers projets informatiques personnels réclamant des supports matériels sur mesure. Or, l’impression 3D est un moyen de les mettre en pratique. Bref. Prétextant ma toute récente quarantaine, j’ai investi dans l’une des imprimantes les plus en vogue auprès des connaisseurs : une Zortrax M200 (version 4 ou v4). Voici mes premières impressions.
La Zortrax M200 se présente tout d’abord dans un carton de taille moyenne d’une vingtaine de kilogrammes. Des poignées en plastique permettent une manipulation relativement aisée tout en empêchant le carton de s’abîmer.
À l’intérieur du carton, l’imprimante est très convenablement protégée. D’une part, par une seconde couche de carton. D’autre part, par un rembourrage de type polystyrène. Enfin, par un film plastique.
Sortir l’engin ne pose pas de problème particulier, même s’il faut faire attention à la prise. En effet, il faut à tout prix éviter d’abîmer le mécanisme d’impression. Il s’agit d’un matériel fragile et de précision. Un carton le rappelle, suggérant une prise en main ne risquant pas d’abîmer l’engin.
En plus de l’imprimante, du câble d’alimentation, du plateau chauffant et d’une bobine de filament propriétaire Z-ABS blanc, le carton contient une liste des pièces incluses, un dépliant d’aide au déballage et d’installation, une documentation cartonnée du plus bel effet, tous en anglais, ainsi qu’un épais livret multilingue faisant office de contrat de garantie.
J’allais oublier ! Le carton contient aussi un kit de démarrage comprenant des gants anti-dérapants, un cutter classique, un cutter de précision, une pince coupante, un jeu de clés Allen, ainsi que de quoi nettoyer l’extrudeur. Enfin, le kit contient une carte SD et un lecteur de carte SD au format USB. En effet, c’est par clé USB que les fichiers d’impression sont transférés depuis l’ordinateur vers l’imprimante. Aucun câble de connexion ou réseau sans fil ne reliant les deux.
L’installation du plateau chauffant fait découvrir l’étonnante connectique de celui-ci. En effet, celle-ci se trouve au fin fond de l’imprimante, et, une fois les panneaux latéraux (optionnels) installés, seules les ouvertures en façade et sur le dessus permettent d’y accéder de manière très inconfortable. Les câbles étant trop courts pour réaliser la manipulation hors imprimante, la manipulation est juste pénible. Or, il s’agit de sortir et rentrer le plateau après chaque impression, le décollage de la pièce imprimée du plateau d’impression se faisant hors imprimante. Un défaut de conception gênant.
La notice est à l’image du constructeur : avare en renseignements pratiques. Le néophyte que je suis ne s’est pas senti très à l’aise face à ce manque d’informations exhaustives. Néanmoins, on y arrive. Même remarque pour le kit de panneaux d’isolement, où la notice d’installation peut laisser croire que trois pièces s’installent définitivement, alors qu’il ne s’agit que de guides destinés uniquement à la pose d’autres éléments. Passons sous silence des schémas obsolètes (ne correspondant pas au modèle 4 livré) et les coquilles sur les pseudo-captures d’écran de l’appareil. Rien de bloquant, ni mettant en péril le matériel ou son utilisateur. Juste… déroutant.
Pour finir l’installation de l’imprimante elle-même, il faut encore installer le filament fourni, ainsi que calibrer le plateau. Ici, ce fut un cauchemar, pour moi. Malgré une douzaine d’heures d’essais intensifs, je n’ai pas réussi cette étape de calibrage. Ce n’est alors que j’ai vérifié le plateau, pas parfaitement plat. Même si le site de support du constructeur ne prévoit pas cette procédure pour le plateau chauffant de seconde génération (plateau chauffant épais), il est possible de le redresser en faisant bien attention à ne pas forcer pour ne pas l’abîmer. Cependant, même non parfaitement calibrée, l’imprimante imprime convenablement. Le calibrage n’en reste pas moins utile pour une impression optimale.
Une fois l’imprimante installée, il faut encore télécharger le logiciel d’impression, Z-Suite. Z-Suite est un outil ayant deux fonctions. D’une part, la préparation des fichiers d’impression aux caractéristiques de l’imprimante et du filament, ainsi que des préférences d’impression. D’autre part, l’accès à la bibliothèque des modèles fournis par les autres utilisateurs d’imprimantes Zortrax. Le principal objet de l’outil reste l’import de modèles et l’enregistrement du fichier de commandes à transmettre à l’imprimante sur carte SD. Les standards de fait de l’industrie 3D sont gérés, à savoir les formats de fichiers STL, OBJ et DXF.
En revanche, aucun logiciel de modélisation n’est fourni. C’est à l’utilisateur d’opter pour le sien. Heureusement, l’offre de logiciels de modélisation ou de conception assistée par ordinateur (CAO) est importante, qu’ils soient open source (Blender, FreeCAD…), gratuits (SketchUp Make, Autodesk 123D Design…), semi-professionnels (Autodesk Fusion 360, CorelCAD…) ou professionnels (AutoCAD, CATIA, Solidworks…), pour n’en citer qu’une poignée.
Et l’impression 3D, alors ? Eh bien, ce billet se limitant surtout aux premières impressions liées au « unboxing », je vous propose de lire la suite de mes aventures en impression 3D dans un prochain article, ou encore de les suivre en temps-réel sur mon compte Twitter !
Quant à vous, vous êtes-vous essayés à l’impression 3D ? Le cas échéant, avez-vous envie de franchir le pas ? Quels sont les imprimantes que vous recommandez ou qui vous font rêver ? Pour quels usages ? Répondez dans les commentaires !
Ça fait plus d’un an que je n’ai pas vu une imprimante 3D, et alors j’en avais vu deux, pas dans le commerce, chacune fabriquée par son utilisateur, chacun étant pluss qu’un petit bricoleur. d:-)
@Cristophe : L’imprimerie 3D se démocratise, mais reste encore l’affaire de spécialistes. Ce n’est que depuis un an que l’on voit débarquer des imprimantes 3D dans les (certaines !) grandes surfaces et les magasins d’électroménager grand public. Pour le moment, c’est un gadget encore trop onéreux, réservé à des makers passionnés et des professionnels désireux d’intégrer cette technologie dans leur méthodologie de conception, la réalisation de prototypes ou de (très) petites séries. Nul doute, cependant, que le marché va croître et que l’on verra, vers 2020, une pénétration plus importante de ce genre de périphériques dans nos maisons.
Bonjour,
Petit déterrage mais après votre unboxing de la zoetrax M200, un peu déroutant comme vous l’avez souligné… Qu’en est il de l’impression, êtes-vous content du résultat ? Le jeu en vaut il la chandelle ?
Cordialement
@Nicolas : Oui, je suis ravi ravi de mon imprimante 3D, que j’utilise régulièrement. En un peu plus de deux ans, maintenant, j’ai procédé à 292 impressions, soit une moyenne de 2½ impressions par semaine. Plus que l’objet lui-même, ou les objets imprimés, la possibilité de concevoir et de concrétiser ses propres objets est très satisfaisante, même si l’on ne peut s’improviser ingénieur en mécanique ou designer de mobilier spontanément. C’est un formidable outil de prototypage rapide.
Ceci dit, la Zortrax M200 comporte des défauts, le principal étant sans doute son prix, bien qu’en phase avec les imprimantes concurrentes. La qualité typique des impressions va de bonne à excellente, avec toutefois quelques ratages de temps en temps. L’expérience permet d’apprendre ce que l’on peut et ce que l’on ne peut pas imprimer, ou comment concevoir les pièces imprimables. Les résultats apparaissent très au-dessus des imprimantes d’entrée de gamme, avec une finesse et précision d’impression très satisfaisantes. Par ailleurs, mi-2017, l’outil de préparation d’impression propriétaire de Zortrax, Z-Suite s’est doté d’une version 2, devenant plus complet, et ouvert aux filaments tiers.
L’impression 3D n’en reste pas moins un domaine encore jeune, et la technologie de dépôt de filament fondu (FDM) des imprimantes de bureau actuelles est encore maladroite. Les imprimantes 2D ont plusieurs décennies d’expérience supplémentaires et arrivent encore à nous énerver avec leurs bourrages papier, des pilotes récalcitrants, ou autres défauts d’encres. Avec la 3D, on doit se montrer encore plus patient et compréhensif, et accepter que certaines choses qui paraissent simples sont encore difficiles.
Enfin, je dois avertir que l’impression 3D d’objets tiers téléchargés depuis Internet n’est pas bon marché. Si l’on inclus l’amortissement de l’imprimante, il est meilleur marché d’acheter des produits en vente dans le commerce, fabriqués par des méthodes industrielles, par injection. L’intérêt d’une imprimante 3D personnelle réside donc dans la possibilité de créer des objets originaux, sur mesure. Et de toucher les objets que l’on conçoit sur ordinateur.
Bonjour Martin,
Un grand merci pour ce super feedback, je suis ravi que l’imprimante convienne à vos besoins et cela me conforte dans mon choix. En effet je suis cette imprimante depuis le projet Kickstarter mais malgré les années et les nouvelles imprimantes 3D sorties, cette Zortrax M200 me fait toujours de l’oeil…
Je me permets de vous poser quelques questions en rapport à votre expérience personnelle. Vos 292 impressions donnent l’impression que l’imprimante ne rechigne pas à la tâche. Qu’en est il de l’entretien ou de la maintenance ? y a t’il des pièces qui s’usent ou qui montrent des signes de faiblesse ? Zortrax a documenté des procédures pour l’entretien, comme la lubrification toutes les 400h d’utilisation par exemple, les suivez–vous ?
A ce propos, combien d’heures d’utilisation de l’imprimante ont nécessité vos 292 impressions ? je crois qu’on peut le voir sur l’écran ?
Les câbles qu’il faut détacher pour enlever le plateau à chaque impression, sont ils vraiment si fragiles et difficiles d’accès ?
Concernant l’impression, comment combattez-vous le warping ?
Enfin je suis vraiment agréablement surpris de voir à quel point le monde de l’impression 3D touche un public aussi large et tend à se démocratiser. Vous évoquez les ingénieurs en mécanique, ce qui est mon cas, mais de ce que j’ai compris vous avez un profil lié à l’informatique ? J’imagine que vous avez des connaissances en électronique ? Je ne sais pas si vous le saviez mais j’ai eu connaissance assez récemment qu’il existe un filament en PLA conducteur (électrique), j’imagine qu’avec une ou 2 astuces, la zortrax pourrait donc même servir à se fabriquer des circuits imprimés sur mesure !
Merci encore pour votre retour,
Nicolas
@Nicolas :
Quelques points marquants concernant l’entretien :
En deux ans, j’ai dépensé environ 310 € TTC pour l’ensemble des pièces, accessoires et buses que l’on pourrait qualifier de frais de maintenance. Cela ne me paraît pas scandaleux, par rapport au prix d’acquisition de l’imprimante, bien que cela aurait été inacceptable pour une imprimante 2D classique.
Je ne respecte pas les lubrifications à l’heure près, mais oui, je lubrifie parfois les pièces, sans toutefois les démonter. Quelques mililitres de graisse blanche sont fournis avec l’imprimante, et je ne l’ai qu’entammée. Au-delà des errements initiaux, et les modifications énumérées précédemment, l’imprimante n’a pas exigé d’un entretien que je qualifierais d’excessif, dans le cadre d’un usage de loisirs.
L’imprimante affiche « 1033h 33m » de temps d’utilisation. Cela est en phase avec mon journal d’impression que je maintiens manuellement, mais qui ne tient compte que du cumul du temps d’impression, hors préchauffage, notamment. Ainsi, j’arrive à une durée d’impression cumulée de 945 heures et 19 minutes.
Oui, comme indiqué précédemment, les câbles sont trop fragiles pour ce type de machine. Le câble reliant l’extrudeur à l’imprimante peut se plier, s’arracher et provoquer des faux contacts. Le câble reliant le plateau, en particulier celui des sondes permettant de régler l’axe Z (la hauteur) et vérifier la température du plateau chauffant est extrêmement facile à arracher et difficile à resouder (pour le débutant que je suis).
J’imprime en ersatz d’ABC (Z-ULTRAT), j’évite l’ABS pur (Z-ABS). L’ABS est très susceptible à la déformation et très sensible au niveau du plateau.
Par ailleurs, connaissant les défauts du plateau, je positionne et oriente l’impression sur le plateau dans le slicer de Zortrax (Z-Suite) pour tenir compte de ces défauts spécifiques à ma machine. Selon les forces en jeu sur la pièce définitive, j’oriente aussi la pièce pour privilégier la robustesse mécanique sur certains angles au détriment d’autres. En effet, l’impression à base de dépôt de filament (FDM) rend les couches superposées plus fragiles sur l’axe d’impression vertical que sur le plan horizontal.
De plus, je limite la taille des pièces, n’en imprime qu’une à la fois pour accélérer l’impression et réduire les déformations.
Enfin, jouer manuellement avec la vitesse du ventilateur est possible pour certaines pièces, mais cela reste de l’art, plutôt qu’une méthodologie éprouvée.
J’ignore quelle est l’efficacité des panneaux latéraux, censés aider à conserver une température homogène durant l’impression. Je les conserve, mais je doute de leur impact sur la préservation de la température et la réduction de la déformation en cours d’impression.
Malgré tout ceci, j’ai des déformations, en particulier sur les pièces de grande taille, qui, en particulier en ABS, peuvent conduire à des fissures et autres courbures difficiles, voire impossibles à éviter.
Je suis analyste-programmeur de formation, avec des compétences rudimentaires en électronique (essentiellement limitées à l’Arduino et compatibles).
Je crains que le filament conducteur soit un problème : il est possible, techniquement, de changer de filament en cours d’impression, manuellement, en insérant des pauses dans le slicer. Cependant, ce n’est pas pratique, et l’approche de l’impression avec plusieurs filaments est peu réaliste avec une Zortrax M200 ou toute autre imprimante ne disposant que d’un unique extrudeur. Pour cela, il est peut-être plus pertinent de s’orienter vers une imprimante de type Ultimaker 3, ou encore des imprimantes open hardware que l’on ajuste à ses propres besoins.
Tout le plaisir est pour moi. ;-)